DOC. 131 DISCUSSION ON RELATIVITY 247 110 [M. Meyerson.] bulletin de la societe francaise Pour lui, comme pour le fondateur du positivisme, la science n'est qu'un recueil de regies, de lois. Elle ne connait et ne doit chercher ä preciser que les rapports, les relations entre les choses et doit resolument ecarter tout ce qui vise ä la connaissance des choses elles-memes, connaissance que l'on declare metaphysique. Vous savez, d'ailleurs, que le positivisme, des les premiers disciples d'Auguste Comte, s'est souvent efforce d'entrer en rapports etroits avec un idealisme extreme (ainsi chez Taine. par exemple, avec la [25] doctrine de Hegel), en reliant la non-recherche de la chose ä sa [26] non-existence en dehors de la conscience. Il ne faut donc point s'etonner, la confusion que favorise l'emploi du terme un peu ambigu de relativite aidant, de voir les partisans de cette doctrine chercher ä s'appuyer sur les conceptions de M. Einstein, en pro- clamant que la relativite de l'espace prouve celle de notre connais- sance dans tout ordre d'idees et nous montre, par consequent, combien il serait vain de vouloir penetrer dans l'interieur des choses, ainsi que pretendent le faire les theories atomiques. C'est lä, en effet, le veritable point crucial de la question entiere. Comte, pousse par son puissant instinct scientifique, avait, par un illo- gisme heureux, declare l'atomisme une bonne theorie . Mais dejä John Stuart Mill avait apercu que, pour suivre les principes [27] du positivisme avec plus de rigueur, il fallait faire abstraction de l'objet et chercher ä etablir des relations directes entre nos sensa- tions, et Mach s'est montre resolument hostile aux theories ato- miques. Pour lui. comme pour l'ecole energetiste qui l'a suivi, l'ideal d'une science, c'est la thermodynamique, parce qu'elle a l'air de renoncer ä toute figuration de la matiere dont elle s'occupe et se borne ä deduire ses enonces de deux principes abstraits. Cette attitude s'est manifestee d'une maniere tres prononcee dans les dernieres annees du xixe siecle et au debut du siecle actuel, lors des decouvertes qui ont revele la discontinuite de la matiere et provoque ainsi un retour vers les conceptions atomistiques. Aux yeux des energetistes, cette puissante evolution, qui constituait manifestement un progres immense du savoir, apparaissait comme un recul funeste. - Je ne chercherai pas ici ä vous demontrer a quel point ces pretentions sur lesquelles, vous le savez, la science a passe resolument ä l'ordre du jour, etaient vaines. Je me bor- nerai ä constater qu'entre les conceptions de Mach dans cet ordre d'idees et la theorie de M. Einstein il ne semble y avoir aucun lien veritablement intime ni necessaire. On peut fort bien etre partisan de la relativite de l'espace et etre convaincu neanmoins, comme l'avait dejä etabli Malebranche, qu'aucune science n'est possible [28] sans que l'on pose, prealablement, l'objet demeurant en dehors de